Archives mensuelles : Mai 2009

Offici■l

It is often said that “English is the official language of Mauritius”. Is it really so?

To some extent yes. Government matters are usually dealt with in English, though some French words can appear here and there since the non-criminal law, i.e. the civil law, is still largely based on the Code Napoléon. For example, in an entirely English official text one can find the words “gage sans déplacement”. The Civil Status Act (1981) says this for instance:

Part IV – Marriage
Sub-part A – Civil marriage
18 Application of sub-Part
A civil marriage shall be governed by the Code Napoleon and this sub-Part.

Most official notices are written in English, except when the public really needs to understand what’s up, in which case it is in French or in Creole (see here). When the government or parastatal organisations want to be seen to be close to the citizens, they use Creole or French, mostly Creole.

The Constitution — written in English by an Englishman in the 60s — doesn’t clearly stipulate that English, or whatever other language, is the official language of the country. It only says English should be used in Parliament. But as it also says, French may be used to address the Speaker:

49. Official language
The official language of the Assembly shall be English but any member may address the chair in French.
(Constitution of Mauritius, chapter V – Parliament, part I – The National Assembly)

In reality, when things start to get bad during parliamentary debates, Creole becomes used more and more, sometimes to the point where words begin to hit other people in the face.

The other day there was a sports day for government services. However, the announcements were being made in French, not English, or even Creole. One could see the Special Mobile Force (SMF), the National Coast Guard (NCG), the Mauritius Ports Authority (MPA), the Mauritius Police Force, etc. in full and sweaty action. Athletic (but not body-built) representatives from all these governmental bodies were running against each other. To manage this little gathering there was a team of people with blue T-shirts on which a word was marked in white letters: “Officiel”.

 

Official <i>officiel</i>

Official officiel.

 

The Jogging Track is free to the public.

The Parcours de Santé is free to the public.

 

Cercles de bras - 5 vers l'avant - 5 vers l'arrière

Cercles de bras - 5 vers l'avant - 5 vers l'arrière - EN MARCHANT

 

Parking réservé ?

Parking réservé ?

 

____________

 

Lalit demonstrating — "Nu premye demand sinp: Seksyon 49 bizin dir: “Lang ofisyel Lasanble li Angle e Kreol Morisyin, me ninport ki mamb kapav pran laparol an Franse u Bhojpuri”." www.lalitmauritius.org

Lalit demonstrating (May 2009). — Nu premye demand sinp: Seksyon 49 bizin dir: “Lang ofisyel Lasanble li Angle e Kreol Morisyin, me ninport ki mamb kapav pran laparol an Franse u Bhojpuri”. — http://www.lalitmauritius.org


http://www.lalitmauritius.org/viewarticle.php?id=886

Gabelou

Gabelou.
Nom masculin

Policier.

Contrairement à la doulce France où gabelou est un terme péjoratif utilisé pour parler des douaniers, dans notre non moins joli pays les gabelous sont exclusivement des agents de la “force policière” — aussi connue sous le nom de “the Force” dans un certain jargon administratif.

Une chose me désole ici : je n’ai pas de photo de policiers en uniforme d’autrefois, quand cette grosse toile grise héritée des Anglais leur seyait à merveille, avec leur ceinturon haut placé sur le ventre, comme dans l’armée grand-bretonne à l’époque de la seconde ou de la deuxième guerre mondiale — ou comme le général de Gaulle sur certaines de ses photos en uniforme.

En août 2006, un certain Volcy — que je soupçonne d’être à même de donner maintes leçons de savoir-vivre mauricien — écrivait savoureusement ceci dans le quotidien L’Express :
« Mais il arrive qu’on puisse damer le pion aux forces de l’ordre. Je me souviens ainsi d’un incident qui eut lieu à la route St-Jean. Un gabelou intransigeant avait levé la main, du geste qu’on utilise pour dire “je le jure”, afin de stopper quelqu’un qui transportait un ami sur son cadre. Continuant son chemin sans se démonter: “Bien sagrin bonom, pena plas”, dit le cycliste, et, laissant le pandore plus naufragé que le raddhoa de la Méduse, il s’en fut en sifflotant. »

Pour saler le porc il fallait certes des cochons “au premier d’abord”, mais aussi du sel. J’ose croire que cette denrée, tout comme l’autre, n’a jamais manqué sur nos 720 milles carrés entourés d’eau salée. Et j’ose croire aussi que la perfide Albion, qui nous a amèrement maintenu sous son joug pendant si longtemps, n’a jamais poussé la perfidie jusqu’à taxer le sel de la mer indienne produit dans nos salines, y compris celles dont les jardins abritent aujourd’hui une tête de feu le camarade Lénine encore conservé comme du vulgaire poisson salé dans un bâtiment rougeâtre jouxtant le Kremlin, ce qui fait que le Mahatma n’a pas eu à continuer sa marche jusqu’à nos rivages. Tout au plus avons-nous eu à payer la gabelle un grain de sel dans nos cheveux.

Ferfoute

Ferfoute.
Interjection. (Familier.)

Tant pis. (Signifiant qu’on s’accommodera de la situation.) Registre plutôt neutre : “Il pleut aujourd’hui ? Ferfoute, on ira monter le Pouce le week-end prochain.”

Il peut aussi être utilisé dans un registre plus conflictuel : “Tu n’es pas encore prêt ? Ferfoute bonhomme, moi je pars moi !”

L’expression est empruntée au créole, où, me semble-t-il, elle est souvent employée avec une connotation un peu plus négative et plus agressive qu’en français mauricien, à rapprocher du français standard “va te faire foutre”, comme dans ces quelques exemples :

The accused replied in a loud and arrogant tone: “Mo bien ferfoute ar ou, prend comien contraventions ou envi, ou va conné après ar qui san là ou pé gagne zaffaire”.
http://supremecourt.intnet.mu/Entry/dyn/GuestGetDoc.Asp?Doc_Idx=2236933
(Jugement à la cour de Moka*, mars 2007. Cas d’outrage à agent.)

ene lepok cote boucou zenfoutes pe avoye zote parents ferfoute

http://thisismauritius.com/index.php?option=com_content&task=view&id=191&Itemid=73

(Blog, mai 2006.)

Gouvernman konner ki retard et dégat 1 kongé piblik fer, mais zote ferfoute are sa zote
www.radiomoris.com/forum/archive/index.php/t-1498.html
(Forum sur Radio Moris, mai 2004.)

Le ferfoute créole est manifestement issu de l’“aller se faire foutre” français. On le trouve dans ce contexte chez Loys Masson : « Ils vous enverront faire foutre. Déjà, croyez-moi, la subversion les a gagnés. » (Le Notaire des Noirs, page 103.) Mais, de même que pour l’interjection “baisé”, il a perdu sa connotation sexuelle, et ce bien que le foutre ait donné le difoute mauricien (voir la liste). Quand bien même ce n’est pas là un mot que vous emploieriez devant votre grand-mère, la plupart des gens, je pense, n’associent pas le difoute avec l’expression ferfoute. En créole, c’est souvent “al ferfoute” (littéralement “va te faire foutre”, mais sans la nuance sexuelle), “avoy li ferfoute” (envoie le promener), “mo bien ferfoute” (je m’en fous/fiche)…

Ferfoute, comme je le disais plus haut, peu aussi être utilisé dans un contexte assez neutre pour signifier “tant pis” : “Ayo, ferfoute, pas la peine d’insister, les longanes sont trop haut, on ne pourra pas les casser.” On est face à un inconvénient, certes, mais ce n’est pas nécessairement d’un conflit qu’il s’agit. Traduit en français hexagonal moderne, il pourrait être l’équivalent de “laisse béton”.

 

* Il y aurait probablement une étude à faire sur les retranscriptions en créole de propos tenus au tribunal. De mémoire, un des plus anciens textes écrits en créole mauricien est un rapport de police du XVIIIe siècle.

 

_______

Mise à jour du 22 novembre 2009

 

_______

Mise à jour du 5 août 2012

 

_______

Mise à jour du 1er janvier 2015.

Caricature de Deven T. dans Le Mauricien du 31 décembre 2014 dans laquelle on voir Aneerood Jugnauth disant qu’il n’y aura pas une ferfoute d’appel à candidature pour remplacer le directeur démissionnaire de la MBC.

http://www.lemauricien.com/image/caricature-mauricien-du-31-decembre-2014

Le même Aneerood, utilisant le même mot, dans une caricature du 22 décembre 2014 :

Écolage

Écolage.

Nom masculin.

Frais de scolarité. (Parfois la scolarité elle-même, et il arrive dans ce cas qu’on parle de “frais d’écolage”.)

Le TLF précise que ce sens est vieilli en France, mais qu’il est d’usage courant en Suisse :

Écolage, substantif masculin, vieilli.

a) Fait de suivre les cours d’une école. Synonyme usuel scolarité.

b) Frais d’école dus par un écolier. “Séverin alla un peu à l’école. Son père aurait voulu le faire bien instruire (…); mais, pour cela, il fallait payer l’écolage et les Pâtureau étaient bien pauvres” (E. Pérochon, Les Creux-de-maisons, Paris, Plon, 1921, p. 16).

Rem. Au sens b, le terme est courant en Suisse romande.

En Suisse, donc, mais aussi à Maurice :

Autrefois, que de privations n’endurait-on pas pour envoyer un enfant à l’école. On pratiquait ce qu’on appelait alors les « cycles » à des sommes dérisoires, Rs 10 par mois, pour payer l’écolage, acheter les livres.
(Le Mauricien, 9 mai 2009.)

En 1940, l’écolage mensuel était de Rs 8.00, somme que n’arrivait pas à réunir Mme Cunden pour son fils.
(Le Matinal, 6 novembre 2005.)

Mais ils savent aussi que janvier suit décembre de très près. Et en janvier, l’écolage des enfants représente un gros pôle de dépense.
(L’Express, 26 décembre 2004.)

Aquinze nous apprend qu’en Belgique cet écolage s’appelle un minerval, en référence à la déesse Minerve.

Et la rédaction de cette note m’a permis d’apprendre que selon le Lycée Labourdonnais* les ressortissants Français ne sont pas des étrangers à Maurice. La grille de cette école pour les “droits d’écolage 2009-2010” donne en effet un tarif pour les Français et les Mauriciens (63 250 roupies par an au primaire) et un autre pour les étrangers (92 000 roupies). Un lapsus archéo-colonialiste ?
  
 
  
* établissement privé mauricien, homologué par l’Éducation nationale française et suivant, dans les grandes lignes, le même programme d’enseignement qu’en France

# # # # # # # # # # # # # # # # #

Secular school.

Secular school.

Dalot

Dalot (daleau).
Nom masculin.

Descente d’eau pluviale.

Vieux dalot à l'angle d'un bâtiment bardé de feuilles de tôle.

Vieux dalot à l'angle d'un bâtiment bardé de feuilles de tôle.

De nos jours les dalots sont principalement constitués de tuyaux en PVC, tuyaux aussi utilisés pour relier les drainages à la fosse septique (le Ø110 standard). Ce plastique moderne ne semble guère déranger les cour(t)pas, auxquels il arrive de se servir des dalots comme d’un drainage (cabinet).

Caca courpa sur dalot — presqu'un nom d'œuvre d'art.

Caca courpa sur dalot. (Presqu'un titre d'œuvre d'art.)

Comme tant d’autres, ce mot du lexique mauricien provient de la marine. Dans le Petit dictionnaire de marine (1945), page 68, il est possible de lire ce qui suit :

Dalots. — Dans les navires en bois, ce sont des trous ronds ou ovales pratiqués dans les fourrures des gouttières d’un pont supérieur, d’un pont de dunette, de demi-dunette, etc. Les dalots sont garnis intérieurement de tuyaux en plomb pour l’écoulement à l’extérieur du navire de l’eau qui s’amasse sur les ponts.

Exemple d’utilisation :

Le dalot qui est près de la cuisine s’est bouché avec les feuilles pendant le cyclone et la dalle est devenue une vraie piscine !

Moules à gâteau de toutes formes, arrosoirs, cheminées, décorations d’intérieur, tirelires, “tilamok”, boîtes à lettres, “manzwar”, “cornis”, dalot… Autant d’objets qui s’amoncèlent dans son petit atelier et sur la devanture.”
(L’Express, 19 décembre 2005.)

Mais le pêcheur a trouvé une idée ingénieuse pour recueillir l’eau de pluie. Un dalot déverse toute l’eau récoltée sur son toit dans un fût. C’est celle que l’on boit et qui est utilisée pour tous les usages domestiques.”
(L’Express, 7 avril 2004.)

Au Québec j’ai entendu parler de dalot à propos de la rigole (le canal) située de part et d’autre d’une piste de bowling. D’après le TLF il y est aussi employé avec le même sens qu’à Maurice : « Tuyau de descente des eaux de pluies à partir des gouttières* d’un édifice (Canada 1930, Bél. 1957). »
http://www.cnrtl.fr/definition/dalot

 

* Gouttière ? Tiens, j’ai peut-être là un mot de plus vu qu’ici-bas une gouttière est une fuite dans la toiture.

Canette

Canette.
Nom féminin.

Bille.

Canettes variées

Le mot canettes pour parler des billes pourrait provenir d’un usage régional français. Littré, dans son Dictionnaire de la langue française (1863-1873), a plusieurs entrées pour ce mot, et à la première d’entre elles il donne quatre définitions. La quatrième est la suivante :

(ka-nè-t’) substantif féminin
(…)
Nom, dans quelques provinces, de la bille dont les enfants se servent pour jouer. XVe s.

Dans Le Parler normand, mots et expressions du terroir, Patrice Brasseur a en effet une entrée pour canette signifiant bille.

Le parler normand (Seuil)      (Toutes les photos sont cliquables.)

A la page 44 on apprend que dans l’Orne, le sud-est du Calvados et le sud de l’Eure le mot canette est employé pour parler de la bille pour les jeux des enfants :

Canette -- Parler normand

Cependant, le genre donné par l’auteur est à l’opposé de celui mentionné par littré, lequel est le même que celui utilisé à Maurice (une canette) — à se demander s’il ne s’agit pas là d’une erreur typographique. Il serait sans doute nécessaire de demander à des Normands utilisant (ou ayant utilisé) ce mot pour parler de billes s’ils disent (ou ont dit) « un canette ». Je ne suis pas linguiste, mais j’imagine que si les mots peuvent se transformer au fil du temps, il leur arrive bien plus difficilement de changer de genre. (Peut-être Marie-Lucie ou quelqu’un d’autre pourrait nous en dire davantage à ce sujet.)

Littré, toujours lui, dit encore ceci :

Bourguig. caner, jouer sa bille, sa canette.

(“Bourguig. » pourrait ici être l’abréviation de « bourguignon ».) Mais cela n’explique guère comment on est passé de la canette  signifiant petite cane, ou bobine de fil d’un métier à tisser ou d’une machine à coudre, ou encore bouteille de bière, à la bille. La façon qu’a eue Littré de regrouper ses définitions suggère que le mot utilisé pour parler de la bille proviendrait de l’animal. A titre indicatif, dans d’autres parties de la Normandie on parle d’une canique (voir plus haut, photo de la page 45).

A Maurice, comme dans d’autres pays j’imagine, il existe des noms spécifiques pour parler des différentes variétés de billes. Du temps que je traînais dans la cour de récréation canette en main (ou dans la poche), nous avions les « ordinaires », transparentes avec trois couleurs torsadées à l’intérieur, les « palais ourite », en porcelaine opaque blanche et un motif torsadé tricolore en surface, les « palais dilo », entièrement transparents (sans aucun motif), colorés (vert, bleu) ou pas, les « palais de terre » qui étaient des billes en terre cuite, ou les « palais de fer » qui n’étaient que des billes de gros roulements à billes reconverties. Il est à noter que les billes de roulements à billes n’étaient jamais appelées « canettes ». Les canettes ne servaient qu’à jouer.

Des "ordinaires".

Des "ordinaires", ou "locales".

Il y a quelques temps de cela, j’ai appris de la bouche d’une fillette d’une dizaine d’années qu’aujourd’hui les enfants appelaient « locales » les canettes que nous nous appelions « ordinaires ». En pensant à « local » en tant que mauricianisme (voir la liste), j’ai été obligé de sourire.

Des "palais ourite".

Des "palais ourite", ou "perroquets".

Il paraît qu’aujourd’hui les palais ourite s’appellent des « perroquets ». O tempora…

Un "palais dilo" de nouvelle génération (plus nacré que les nôtres).

Un "palais dilo" de nouvelle génération (plus nacré que les nôtres).

Je suppose que le mot « palais » devrait lui aussi être mis dans la liste de mauricianisme, même si semble-t-il il n’est plus guère utilisé aujourd’hui. J’ai toutefois un doute quant à la graphie que j’aurais dû adopter : palais (palace en anglais) ou palet (puck ou quoit en anglais) ? Il s’agit pour une large part de ce qu’en français on appellerait un calot, si je me souviens bien de mes lectures, c’est-à-dire une bille sortant quelque peu de l’ordinaire, généralement de plus grosse taille que les autres (voir les deux plus gros palais ourite sur la première photo de cette page).

Je me rappelle deux jeux de billes, un peu trop vaguement hélas. Il y avait la « poursuite », qui comme son nom l’indique n’était qu’une poursuite, le perdant étant celui qui était touché le premier, et il y avait le « triangle ».

Le triangle, lui,  pouvait se jouer à plus de deux, si j’ai bonne mémoire, chacun mettant une ou plusieurs billes dans un triangle tracé sur le sol et lançant une autre bille vers une ligne située à une certaine distance du triangle. Celui qui arrivait le plus près de la ligne commençait. Il se mettait derrière la ligne et essayait de sortir des billes du triangle ou à s’approcher de ce dernier en lançant sa propre bille à jouer. Les autres faisaient de même. Après le premier lancer, chacun jouait à tour de rôle, au ras du sol, en poussant sa bille a jouer avec le pouce après avoir avancé d’un empan. Chaque bille qu’on avait sorti du triangle devenait la sienne. Mais je ne me souviens plus de ce qui se passait lorsque sa bille à jouer restait dans le triangle. Perdait-on son tour ? Fallait-il repartir derrière la ligne ? Une âme charitable ayant moins perdu la mémoire que moi pourrait-elle m’aider à la retrouver ?

Batatran

Liane batatran.
Nom féminin.

Liane aux feuilles caractéristiques en forme de pied de chèvre — d’où elle tire son nom scientifique, Ipomoea pes-caprae, ou ipomée pied-de-chèvre — et poussant la plupart du temps sur les rivages sablonneux ou constitués de galets. Résistante à l’eau de mer, on la trouve parfois sur des îlots ou des bancs de sable dont elle constitue la seule végétation. Elle fait partie de la même famille que la patate douce. (Les fleurs sont très semblables.)

Le nom mauricien est une déformation du nom réunionnais, “patate à Durand”, lequel a donné patatran aux Seychelles et batatran à Maurice. A Saint-Denis il existe même une “Ravine des Patates à Durand”. Le nom de la plante viendrait d’un monsieur Durand qui l’aurait introduite à la Réunion pour contrôler l’érosion des dunes à l’Étang-Salé.

My imaginary but nevertheless funny friend A.J.P. Crown, the friend of goats, will certainly be delighted to learn that in English this creeper is called goat’s foot. Not long ago he wrote several posts about the goat’s mouth — la bouche cabri (voir la liste) —, but now he might like to put his foot down and say that enough is enough: we ought to stop using the name of goat for everything and nothing.

A l’occasion, lorsque j’aurais pris quelques photos de lianes batatran, voire de leurs tubercules, j’enguilanderai ce billet. En attendant, bonsoir à tous, humains et caprins, mangeurs de brèdes et mangeurs de lianes.

Batatran sur roches, mai 2009

 

– – – – – – – – – – – – – – – – – – – – –

Addendum : Cette note me permet d’apprendre qu’il existe un lieu appelé Batatran à Rodrigues.
« Marie-Pierrette Momus, habitante de Batatran est heureuse. Elle est parmi les quelque 200 personnes de ce village à avoir reçu des plantes de l’administration régionale pour embellir sa cour*.”
L’Express du 6 avril 2005.

* Nous avons ici un joli exemple de mauricianisme : “cour” pour ce qui en français standard s’appelle plutôt “jardin”.

Fleur de batatran, mai 2009

Batatran_dan_disab

Achards

Achards.
Nom masculin, souvent pluriel.

Condiment constitué de légumes ou de fruits coupés en morceaux, assaisonnés d’épices (curcuma*, grains de moutarde, gingembre, piment parfois), additionnés de vinaigre et d’huile et conservés en pot.

Origine : Urdu/persan achar, prononcé ‘atchar’. Robillard reprend l’hypothèse d’une transmission par l’indo-portugais de Ceylan.

Quelques recettes d’achards :
Achards de fruits de Cythère
Achards de limon
Achards de légumes

Achards_de_légumes

Exemples d’utilisation :

— Qu’est-ce que tu veux que je mette dans ton pain ?
— Des achards !

L’Express du 6 mars 2007 :
Pour ceux qui ont déjà l’eau à la bouche, il est possible d’acheter des achards à partir de Rs 45 et les fruits cristallisés à partir de Rs 5.00 devant la demeure de [Fleurange Lapureté] à Bramsthan.
 
 
 
* Curcuma : Appelé « safran » à Maurice, le véritable safran — provenant des stigmates d’une fleur — y étant pour ainsi dire inconnu. La poudre de curcuma, d’une couleur jaune, provient d’un rhizome apparenté au gingembre. Son nom en anglais, turmeric, viendrait possiblement de l’ancienne appellation française « terre-mérite », venant elle-même du latin terra merita. A l’entrée Turmeric, l’Oxford English Dictionary (Shorter) dit ceci : « Origin obscure. In the early forms tarmaret, tormarith, perhaps representing French terre merite and mediæval or modern Latin terra merita, deserving or deserved earth. »

Mauricien ou morisyen ?

Dans le billet précédent je parlais de celui qui fut le premier correspondant du siganidé, et pendant longtemps le seul. C’est lui qui, à la suite d’un séjour aux Caraïbes, m’avait parlé du « goat’s mouth » des West Indies, lequel était l’exact pendant de notre « bouche cabri » à nous.

Son épouse, pour sa part, a été à l’origine d’un nombre appréciable de mots figurant dans cette collection de mauricianismes. Lors d’un échange d’e-mails, elle a souligné qu’il faudrait séparer les mots créoles des « mauricianismes » que je voulais inclure dans ma liste : « en fait il y a une frontière à trouver pour savoir quand c’est du créole ou du français mauricien. »

Je lui ai répondu ceci : « Non, non, nous parlons là de mots et expressions utilisées lors de conversations tenues en français, pas en créole. Mon frère rigole, et me dit que ce n’est pas du français, mais du « mauricien ». Ben voilà, c’est exactement ce que je cherche.
Il est indéniable qu’il y a un chassé-croisé entre ce « mauricien »-là et le morisyen. La frontière entre les deux n’est pas comme entre les Corées ou entre l’Arménie et la Turquie : elle se franchit facilement. »

En effet, les emprunts du créole au français ne se sont pas arrêtés un beau jour du XVIIIe siècle. Le mot le plus utilisé aujourd’hui pour parler du mobile phone en créole est portab. (“Praveend, to portab fek soné la.”) Par ailleurs, ceux à qui il arrive de parler français à Maurice parlent presque toujours créole aussi, parfois lors de la même conversation — et vice versa. Le journal télévisé principal de la télévision nationale est en français, de même que les principaux journaux de l’île. En outre, le morisyen est et reste un créole à base lexicale française. Tout ceci fait que le va-et-vient entre une langue et l’autre est permanent, et la frontière entre les deux parfois un peu floue. Il n’empêche qu’il est possible de recenser les mots couramment employés dans une conversation se passant en français, même si ces mots peuvent être vus comme appartenant avant tout à une autre langue.

Bon, ceci étant dit il va bien falloir se mettre au travail. Prochain billet sur le verbe « sailler » évoqué par A.J.P. pas plus tard qu’aujourd’hui ? Il va falloir faire son homework*…

 

* en mauricien dans le texte

Les mots de Zozo

For several years, I, Siganus K., have had only one friend. That was before I started blogging and having all sorts of imaginary friends. Once upon a time, this sole friend gave a book to our youngest child: Les Mots de Zaza. He also used to give bedtime readings every now and then, while visiting us. Everyone in the family started to love Zaza.

zaza-couverture1

Zaza is a little mouse who loves to collect things, any things. But the things she loves collecting most are words, words, words. She keeps them under three bells: a small bell for cute little words, a medium bell for plain ordinary words, and a big bell for all the gros mots.

zaza-4e-couverture

In the beginning she likes to hear the delicate sounds of the little bell. Then she is interested in the medium bell, which sings with a monotonous voice: “Papa, Maman, écriture, jambon, tricot, hiver, téléphone, phone, phone…”

But very soon she becomes a real Steve Dodson and she starts to love all the swear words.

zaza-pp16-17

Her parents are not always pleased with the passion their daughter is developing, but it’ll save their life.

zaza-pp18-19
(Excuse the walking stick busy walking over the page while I took the picture.)

It looks as if I have become a Zaza too. I have started collecting words. Today I found at least three of them: “sailler”, “platin” and “gratelle”. My wife and I were busy moving something that was partly under another thing and I said to her: “Il faut le sailler.” (This has nothing to do with any horse breeding whatsoever. It is just the word we sometimes use for “slide”, or “skid”.) We had to slide the first thing horizontally to be able to remove it. I just stopped and said to her: “Sailler, voilà encore un mot pour ma liste !”

So, like Zaza I now collect words. And like Zaza, I might like the gros mots too. Actually, I believe these are the words that have the strongest self-preservation instinct. Even if they are not used that often, they just don’t want to disappear. And since they are not written most of the time, they have very good reasons to be different from those used by faraway (French) people. So don’t be afraid if you see a lot of swear words. I am not (too) obsessed with them [à voir, à voir…]. It is just that, for the reasons mentioned above added to the fact that they were also borrowed from other languages sometimes, they are relatively well represented in the list of words differing from standard French.