Roche à laver

Roche à laver.
Nom féminin.

Grosse pierre plate, généralement taillée, utilisée pour faire la lessive.

Maryse lève les yeux. Plusieurs hommes l’épient. Ce sont des policiers venus perquisitionner. Ils envahissent la maison, la fouillent de fond en comble puis poursuivent leurs recherches dans la cour. Sous la roche à laver se trouve une petite sacoche noire. Un des policiers ouvre la fermeture éclair et en retire un paquet emballé dans du plastique. C’est du gandia. Il y en a pour cinq kilos.”
(L’Express, 23 novembre 2003.)

Hommage aux femmes d’antan. Souvenir de la roche à laver. Réminiscence de ces femmes qui avaient aussi le temps ‘pou mont lor ros.’
(L’Express, 27 octobre 2007.)

Non loin du cadavre de la victime, les policiers affectés au poste d’Eau-Coulée, de même que ceux de la Major Crime Investigation Team (MCIT), ont retrouvé une grosse ‘pierre’ qui porte des traces de sang. Cette ‘pierre’ serait, selon les indications recueillies par Week-End, légèrement plus petite qu’une ‘roche à laver’. C’est avec cette ‘pierre’ qu’Asha Ramchurn a été cruellement achevée.”
(Week-End, 29 mars 2009.)

Ce Quatrebornais de 56 ans est dhobi depuis sa tendre enfance. Debout dans l’eau glacée de la rivière à Ébène, à proximité du pont Trianon, il frotte son linge méticuleusement sur la roche. En même temps, il lui faut faire en sorte de ne pas abîmer le vêtement sur la traditionnelle roche lavé.”
(Week-End/Scope, 19 octobre 2007.)

Elle est toujours aux fourneaux, sur la ros kari ou la ros lave.”
(L’Express, 28 août 2008.)

La Belle Kréole : un hymne aux traditions culinaires mauriciennes
Les accessoire décoratifs parlent d’eux-mêmes : marmites en fer-blanc, réchaud, ‘roche à laver’, ‘brosse coco’, vieille bicyclette…

(Guide Petit Fûté Maurice Rodrigues 2009, page 364.)

L’expression existe à la Réunion aussi :

Depuis 1906, elle habite le quartier où elle a vu le jour à Sainte-Rose, le Petit-Brûlé. Elle habite aujourd’hui là où elle est dans une authentique case créole. Plus connue sous le nom de Mme Raoult, cette centenaire continue à lessiver son linge sur la roche à laver.
(Témoignages, 18 octobre 2006.)

Chez la vieille tantine Toria, il y avait un grand carré de ‘bâtons de jour de l’an’, qu’on nommait aussi ‘boules de bleu’ et quand les fleurs commençaient à flétrir on récupérait leurs tiges. Sur la roche à laver et après avoir fendu chacune en quatre, il fallait la débarrasser de sa ‘mie’.”
(Le blog de Monique Mérabet, juillet 2011.)

Et peut-être même en Guadeloupe :

Et pour finir nous avons fait une lessive sur la «roche à laver» de nos grand-mères.”
(Journal d’une école maternelle de Basse-Terre, avril-mai 2007.)

L’expression dérive du mot roche employé pour parler d’une pierre, et au sens plus large de tout morceau de matière pétrée, qu’il ait un diamètre de quelques millimètres ou de plusieurs dizaines de mètres (cf. le billet sur les meules de roches). Les roches que l’on utilise pour un usage particulier reçoivent ainsi un nom particulier (cf. la roche [à] cari).

16 réponses à “Roche à laver

  1. Merci pr la roche a laver…tout comme la roche a curry avec son baba…c est un de nos folklores qui va hélas disparaitre..A quand un musée avec toutes ses artefacts qui nous lient a notre histoire et patrimoine??
    On se souvient aussi des «  »boules bleues » » que l on mettait dans des Séaux !!! pr faire tremper le linges blancs qui venaient d etre battus sur la roche…Ces roches prenaient avec le temps, une patine blanchatre et crémeuse du aux savons qui étaient mis dans les petites boules de toile..; pour economiser;;le produit..
    Qui a encore sa roche laver dans sa cour???
    MOI j ai ma roche curry + baba…

  2. Précisons que l’origine de nos roches laver sont les pierres plates que les dhobis sélectionnaient pour faire la lessive de leurs clients dans nos cours d’eau. L’avènement de l’eau courante a permis de ne plus avoir à aller à la rivière, d’où le choix de tailler la pierre (de lave?) et d’amener ces derniers chez soi.

  3. Roche laver/lave-linge ek so omo, ek so savon National. Ek so bleu ki fer vinne blanc. 🙂

  4. Siganus Sutor

    Alsace, seriez-vous prête à renoncer à votre machine à laver et à vous esquinter les mains en faisant la lessive sur une roche, uniquement pour faire perdurer le folklore ? Pour ce qui est des “boules bleues”, je n’en ai aucun souvenir. Je suis comme Carrotmadman : ce qui me vient à l’esprit c’est la lessive en poudre Omo et ce sont les barres de savon National.

    Pépé, aujourd’hui les dhobis ont des machines à laver. Mais je suis sûr que certains de leurs clients préfèreraient qu’on lave leur linge “à l’ancienne”, sur une roche. Pour un certain nombre de personnes, “à l’ancienne”, “kouma lontan”, c’est toujours mieux que ce qu’on fait dorénavant. Pour ce qui est des pierres volcaniques qui autrefois furent de la lave, il existe des gens pour penser qu’il y a un cousinage étroit entre ce mot et le verbe laver. C’est ce que dit etymonline.com (un site sérieux) : “lava – 1750, from Italian (Neapolitan or Calabrian dialect) lava ‘torrent, stream,’ traditionally from Latin lavare ‘to wash’. Originally applied in Italian to flash flood rivulets after downpours, then to streams of molten rock from Vesuvius.” L’Oxford English Dictionary mentionne lui aussi comme origine le verbe lavare, “to wash”. Mais pour leur part les lexicographes français (Dauzat et al, Le Petit Robert) semblent faire dériver le mot napolitain lava du latin labes, éboulement.

    Carrot, dan konstriksion souvan servi dibwa 4×4 kouma sipor pou bann decking. Bann zouvrié abitié apel sa bann bout dibwa-la bann “bar savon”. Vrémem zot kouma dir enn gro bout savon National. Mo rapel lontan enn tifi ki ti sey sisidé (enn zafer galan). Li tir bwar enn “détergent” — mo pa sir ki zafer exaktéman. Lerla ena bann kouyon dan vilaz ki ti komans krié li “Omo ! Éta, Omo !”

  5. Laver un slip sur la ros lavé, facile, un tee-shirt ou un short, ok, un pantalon ou un jean, ça commence à faire, et un drap de lit, là, chapeau!
    Je me souviens de ces carrés (plutôt des cubes) bleus comme d’un adoucissant. Pour ces grands draps à laver, on les faisait tremper avant dans un « baquet » contenant de l’eau à laquelle on avait rajouté un bout de bleu. Ça assouplissait le drap qui épousait la forme de la roche plus facilement et on pouvait faire glisser le drap pour le savonner. Il était bien d’avoir 2 baquets, un d’où partait le drap et l’autre pour recevoir la partie savonnée. L’assouplissement permettait aussi d’enrouler le drap facilement afin de le taper sur la roche (« flak linz la »). Avant chaque coup, en un tour de poignet, on changeait de « côté » à taper; certains changeaient de mains entre 2 coups. J’ai jamais trop su pourquoi il fallait taper le linge. Probablement pour chasser la saleté, mais par quel biais?
    Ensuite il fallait « percer » le linge à la main; une sacrée tâche! Les jeunes garçons se faisaient flatter par leur mère: « toi qui as de gros mux (muscles), viens percer ça un coup ».

    La roche à laver était aussi un lieu de prédilection pour les enfants pour jouer dans l’eau; ils avaient toujours quelque chose à laver (les habits de poupée, les pelles à sable, …). C’était un moindre mal et évitait le « dézord dan lakaz ».

    Mon père qui avait été « opérateur de cinéma » (projectionniste) m’avait montré comment on pouvait mettre une barre de savon National sous l’arc du projecteur (c’était du carbone à l’époque, ils disaient « charbon », aujourd’hui je crois que ce sont des lampes halogènes) pour la ramollir et pouvoir la débiter en morceaux pouvant être plus facilement pris en main.

  6. Siganus Sutor

    Haha, Zippo, on dirait que vous vous êtes bien amusé là. Je revois au moins une photo de ma sœur occupée sur la roche à laver de la cour, mais il doit bien y en avoir une de moi aussi, encore enfant. Ç’aurait été trop injuste sinon.

    Pour ce qui est de fouetter le linge sur la roche, ça doit être un mème datant au moins des premiers Homo erectus. (Il me semble que sous d’autres cieux les femmes (mais pas les hommes) peuvent avoir une sorte de batte de cricket pour frapper le linge qu’elles sont en train de laver.) Sans doute fallait-il flanquer une bonne raclée à la crasse, pour qu’elle ne revienne pas trop vite. Et peut-être est-ce pour cela aussi qu’on perce le linge, à grands coups de sagaie à l’origine, j’imagine.

  7. Oui je m’amusais pas mal avec l’eau, allant même la chercher dans le puits de la maison pour me mouiller les cheveux, je parle bien sûr des toilettes. La relève à la roche a été assurée par les filles de ma cousine dont une m’avait demandé un jour si j’avais prévu d’aller me promener. Quand j’avais acquiescé, elle a vite ajouté: « allez, pars maintenant » afin de ne plus être ennuyée par des « arrête de jouer avec l’eau ». 🙂

    Je me rappelle aussi que dans la petite rivière à Belle-Rose en face du Super U (?) et derrière l’atelier de l’ébéniste, y avait des lavandières qui venaient dans les années 70. Elles profitaient des grandes étendues d’herbe pour ensuite étendre le linge. C’était un coin pour aller pêcher des long tails en agréable compagnie.

    Un avantage avec les roches à laver était qu’il y avait un robinet à côté situé pas très haut par rapport au sol. Au moins pendant les cyclones, il y avait un peu de pression pour pouvoir récupérer ce mince filet d’eau marron. J’ai même « pris » la douche sous ce robinet pendant Gervaise.

    Acessoirement la roche pouvait aussi servir de pierre pour se poncer les talons en équilibre sur une jambe.

  8. Autrefois, en France il y avait sur le bord des rivières ou autres étendues d’eau des lavoirs, lieux aménagés avec une ou plusieurs grandes pierres plates inclinées vers l’eau, derriere lesquelles les lavandières (le plus souvent professionnelles) s’agenouillaient pour battre le linge trempé et savonné avec leur battoir (outil en bois à peu près de la taille et de la forme d’une grosse raquette de ping-pong), pour faire pénétrer l’eau savonneuse dans le linge et déloger les saletés en même temps que cette eau. Il fallait ensuite rincer le linge dans l’eau de la rivière. Les lavoirs avaient le plus souvent un toit mais pas forcément de murs. Il y en a encore beaucoup que l’on conserve comme élément pittoresque, mais les lavandières n’existent plus (mais il y en avait encore quand j’étais enfant). C’était un métier extrêmement pénible, malsain, et très peu payé par les clients qui donnaient leur linge à laver.

    C’est cette situation qui est décrite dans la chanson « Les lavandières du Portugal » (traduite du portugais), qui était très populaire quand j’étais jeune: le refrain était:

    Tant qu’y aura du linge à laver, on boira de la manzanilla,
    Tant qu’y aura du linge à laver, des hommes on pourra se passer.
    Et tape, et tape, et tape avec ton battoir!
    Et tape, et tape, tu dormiras bien ce soir!

  9. @Gro Zippo >> effectivement, le fameux ponçage obligatoire de talons du dimanche matin chez mon grand-père se faisait sur une roche à laver. Je me rappelle surtout des différentes textures de roches. Chez mes parents, la roche était râpeuse et ponçait très bien car elle était jeune, chez mon grand-père c’était plus difficile parce que les années de lavage avaient rendu les aspérités plus arrondies, douces et lisses comme sur la photo ci-dessus. Une roche à laver neuve doit être très mauvaise pour les vêtements, surtout que sur Mars on aime beaucoup les T-shirts colorés et imprimés.

  10. Pépé, j’y arrivais pas trop, car je crains les chatouilles et même aux talons ça me chatouillait. C’était marrant, l’équilibre qu’il fallait avoir me fait penser à celui qu’il fallait avoir pour passer la « brosse coco ».

  11. Marie-Lucie, merci pour l’explication. Quelque part, battre le linge joue le même rôle que l’adoucissant pour mieux faire pénétrer l’eau.
    J’ai pu vous retrouver un lavoir dans un petit village pas loin. Celui-ci est pas mal avec son récupérateur d’eau de pluie.

  12. >Siganus Sutor
    Même aujourd’hui c’est habituel de voir quelques petites boules bleues dans les lessives pour le blanc.

  13. Zippo. On « tape » toujours le linge…encore aujourd’hui ! Les tambours des machines modernes ont des épaulements sur lesquels le linge vient se fracasser, tour après tour. Ce n’est jamais qu’une reproduction mécanique de ce « battage » indispensable.

    Mère Denis .

  14. Gro Zippo, merci pour ces photos, mais les lavoirs en question ne me paraissent pas très authentiques: le premier est trop petit, il n’y a rien où l’on puisse poser le linge pour le battre, et il est loin d’une source naturelle d’eau (pas forcément une vraie source, je veux dire par exemple une rivière). On dirait plutôt un abreuvoir pour les chevaux, et encore, car il paraît bien bas et bien petit. Le deuxième paraît un peu plus authentique, mais quand même un peu douteux (l’angle de prise de la photo est un peu trop bas pour qu’on puisse voir les détails des bassins). Dans les deux cas il se peut qu’on ait déplacé un bassin qui était situé ailleurs, sans doute loin du centre-ville, pour le mettre dans un lieu plus visible.

    Je vous réfère à la page « lavoir » de Wikipédia. Vous y verrez quelques lavoirs anciens, dont la célèbre Fosse-Dionne, à Tonnerre (Yonne), la ville où je suis née mais où je n’ai vécu que quelques années. Cette fosse a aussi sa propre page sur Wiki:

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Fosse_Dionne

    et en plus de la photo de cette page il y a en d’autres mentionnées sur Google.

    Cette fontaine, très profonde, a servi très longtemps de lavoir public. Les derniers aménagements (qu’on voit sur plusieurs photos, ça vaut la peine d’en regarder plusieurs) datent d’avant la Révolution, mais la fosse , un trou à peu près rond, servait sans doute de lavoir depuis longtemps auparavant. Le lavoir en temps qu’installation servait encore un peu quand j’étais toute petite, mais la dernière fois que je l’ai vu (dans les années 50) il n’était plus entretenu et la fosse était encombrée de mousses et autres plantes aquatiques. Le lavoir doit être un monument historique maintenant, il a du être restauré et la fosse nettoyée, ce qui met en valeur la couleur naturelle de sa belle eau bleue-verte.

  15. Marie-Lucie, je souris car je m’attendais à votre réaction en raison de l’absence d’eau. Il est vrai que le lavoir est à l’extérieur du village; je suis passé devant depuis 10 ans maintenant mais je n’y suis jamais entré. Pour retrouver cette image, j’avais demandé à une collègue qui habite ce village de me confirmer si c’était bien celui-là; elle m’a dit « tu sais qu’à l’intérieur c’est aménagé pour laver le ligne? ». Je lui ai répondu qu’avec Google Maps on ne pourrait voir que l’extérieur, mais la curiosité me pousse maintenant à y rentrer la prochaine que je m’y rendrai. Avec le prix croissant du mètre carré à Grenoble, les gens vont habiter autour. Ces villages deviennent des lotissements où les maisons poussent très vite. Y avait-il une étendue d’eau là avant ? Je ne sais pas, je me renseignerai. Le deuxième bassin (devant l’école) m’a été indiqué par la même collègue. Je lui ai dit que je ne voyais pas d’installation pour laver, mais elle m’a dit que c’était juste un bassin où les lavandières pouvaient récupérer de l’eau. Avaient-elles des planches « portatives » ? Là non plus, je ne sais pas. Je peux juste vous dire que les gens du coin connaissent ces deux lavoirs, j’essaierai d’en savoir plus.

    Arcadius, j’ai eu l’occasion de changer un de ces épaulements. Je m’étais demandé pourquoi ils nous emm…. à mettre des trucs pareils (je suis pas très bricolo); je pensais que c’était pour retourner le linge (le brasser en quelque sorte). J’avais pas fait le parallèle, comme souvent; merci de me l’avoir indiqué.

  16. marie-lucie

    Gro Zippo, vous aviez donc du faire les mêmes réflexions que moi sur ces soi-disants lavoirs. Merci quand même. Et j’espère que vous allez jeter un coup d’oeuil sur la Fosse-Dionne, elle en vaut la peine.

    un bassin où les lavandières pouvaient récupérer de l’eau.

    Pour emporter cette eau où? comment? Votre collègue a-t-elle jamais vu une lavandière au travail?

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