Ce blog tourne assez mollement autour de la question du langage à Maurice. Il est censé s’intéresser avant tout au français tel qu’il est parlé dans l’île, mais comme ce français-là se trouve en interaction permanente avec d’autres langues (au point parfois d’avoir du mal à se départager de son rejeton créole), on en arrive à évoquer ces autres langues-là aussi.
L’anglais par exemple. Un article de L’Express lu aujourd’hui, jour J-30 de la campagne électorale, disait qu’en vertu d’un article de notre Constitution un tiers des Mauriciens n’auraient pas pu se porter candidats aux élections. Dans un entretien accordé au quotidien, l’avocat Marc Hein, ancien député travailliste, faisait ressortir que « l’article 33(d) de la Constitution prévoit qu’une personne qui souhaite faire acte de candidature à la députation doit pouvoir parler et écrire l’anglais avec une maîtrise suffisante pour lui permettre de prendre une part active au déroulement des travaux de l’Assemblée nationale. »
En effet, l’article en question est libellé de la sorte :
33. Qualifications for membership
Subject to section 34, a person shall be qualified to be elected as a member of the Assembly if, and shall not be so qualified unless, he –
(a) is a Commonwealth citizen of not less than the age of 18 years;
(b) has resided in Mauritius for a period of, or periods amounting in the aggregate to, not less than 2 years before the date of his nomination for election;
(c) has resided in Mauritius for a period of not less than 6 months immediately before that date; and
(d) is able to speak and, unless incapacitated by blindness or other physical cause, to read the English language with a degree of proficiency sufficient to enable him to take an active part in the proceedings of the Assembly.
Et à notre ancien parlementaire interrogé par Jean-Yves Chavrimootoo de préciser : « Ce critère élimine, de facto, d’après mes estimations, pas moins d’un tiers de la population mauricienne. » Ajoutant par ailleurs une chose assez vraie à même d’illustrer l’absurdité de certains de nos textes de lois : « 99 % de la campagne actuellement en cours se fera en kreol. Mais celui qui est un expert en kreol ne peut pas se porter candidat s’il ne parle pas et n’écrit pas l’anglais. »
Autre absurdité : un Mozambicain parlant et écrivant l’anglais — même si c’est comme une vache portugaise — pourrait être candidat aux élections mauriciennes s’il a résidé à Maurice pendant deux ans, alors qu’un laboureur de Lallmatie né à Maurice de parents mauriciens, ayant toujours vécu à Maurice et ne parlant que créole et bhojpuri ne le pourrait théoriquement pas.