Je ne suis pas certain qu’il s’agisse là d’une particularité mauricienne, mais plusieurs fois j’ai entendu employer l’expression “peau de fesse” pour parler d’une personne désargentée. « Sa famille est peut-être well off, mais lui c’est une peau de fesse. » « Au début de mon mariage j’étais peau de fesse net. » Cela se dit-il dans ce sens en français standard ?
Certes, on emploie “peau des fesses” dans l’expression “Ça m’a coûté la peau des fesses” — « quelque chose qui vaut très cher, à laquelle on tient beaucoup » (Wiktionnaire), mais cela ne veut pas dire la même chose. Ici cela suggère que l’on tient à la peau de ses fesses autant qu’à la prunelle de ses yeux, ou presque — c’est une question de point de vue.
« Au début de mon mariage j’étais peau de fesse net. » Cela se dit-il dans ce sens en français standard ?
Même si ça se dit en France (je ne veux pas me prononcer là-dessus), ce n’est pas nécessairement du français standard, car c’est bien évidemment de l’argot. J’ai l’impression que le fameux français dit « standard » (qui me semble être surtout le français écrit – sans être forcément littéraire) exclut le français oral familier ou l’argot. Donc il n’y a guère de gens qui parlent en fait le « français standard » dans leur vie quotidienne.
On trouve en France l’expression une perruque en peau de fesse , pour parler de quelqu’un de chauve.
Ou encore prendre quelqu’un par la peau des fesses, pour signifier qu’on l’oblige à faire quelque chose.
Enfin, il me semble avoir aussi entendu traiter quelqu’un de peau de fesse en lieu et place de trouduc.
Plus sur les fesses.
On lit ceci, signé de Jean-Luc Hennig, grâce au lien donné par Aquinze:
«On taxait ses ennemis de vieille fesse, fesse de rat, face de fesse, peau de fesse ou fesse d’huître, sans que personne bronche.»
Si j’ai déjà entendu ou lu fesse de rat ou fesse d’huître , je ne connaissais pas peau de fesse pour traiter quelqu’un.
Et je ne l’ai jamais entendu dire de quelqu’un de désargenté, comme le signale Siganus.
Marie-Lucie : il n’y a guère de gens qui parlent en fait le « français standard » dans leur vie quotidienne
A défaut d’autres mots j’utilise l’expression français standard pour parler du français commun, du français moyen (ou médian), du français susceptible d’être utilisé — ou tout au moins compris — par le plus grand nombre. En gros il s’agit du français de France sans ses particularismes régionaux. L’argot commun, opposé à un argot plus marginal, aurait tout à fait sa place dans ce français-là. Nase (fatigué), thune (argent), paluche (main), miches (fesses), meules (fesses) sont des mots que je considérerais pratiquement “standard”.
Aquinze : Enfin, il me semble avoir aussi entendu traiter quelqu’un de peau de fesse en lieu et place de trouduc.
Je ne l’ai jamais entendu ainsi pour ma part, mais il est intéressant de noter que l’expression peau de fesse (au singulier) peut servir à qualifier une personne.
Leveto : je ne l’ai jamais entendu dire de quelqu’un de désargenté
Dans ce cas il devrait s’agir d’un mauricianisme, “une peau de fesse” étant donc une personne sans le sou.
J’ai par ailleurs déjà entendu « lisse comme une peau de fesse », expression s’ajoutant aux sens plus fréquents figurant déjà dans la liste : 1. Imbécile, idiot, con. « Ça c’est une fesse ce boug-là ! » 2. Fatigué, épuisé, mort, plote. « Hier soir j’étais fesse. »
In English you make a narrow escape « by the skin of your teeth ».
L’expression que j’entends le plus souvent est « mo lapo fess pas pou moi » = je suis fauché/sans le sou…
ps: une petite discussion a récemment eu lieu entre ma mère est moi au sujet de l’expression « li pe declar tenor » (il se la joue), dont l’une des variante est « li pe fer so fanor ».
Or ma mère…du haut de son âge vénérable me soutient que « fanor » c’est une plante. Point à la ligne. Des idées sur la question cher Cordonnier?
« le français standard »: En gros il s’agit du français de France sans ses particularismes régionaux.
Donc, le français écrit, parce qu’en parlant on ne peut pas s’empêcher de montrer ses particularismes régionaux (y compris « parisiens »).
Ici au Canada beaucoup de francophones sont particulièrement pointilleux sur les usages du français. Il y a des livres où l’on voit écrit, par exemple: Fr standard: Je ne sais pas, Fr québécois: J’sais pas. La plupart du temps l’usage donné comme « fr. québécois » n’est pas particulièrement canadien mais simplement une forme orale familière du français (celui de la moitié Nord, puisque les méridionaux parlent différemment). J’ai entendu quelques Canadiens (pas la majorité) qui prononçaient tous les e muets sauf à la fin des mots, puisqu’ils sont écrits: donc « jeu neu sais pas », et non « je n’ sais pas » comme en France (de la moitié Nord), avec l’impression qu’ils parlent le fameux « français standard ».
Nase (fatigué), thune (argent), paluche (main), miches (fesses), meules (fesses) sont des mots que je considérerais pratiquement “standard”.
Vous aussi, Siganus, vous êtes beaucoup plus jeune que moi. D’autre part, je ne vis pas en France, et je ne lis pas beaucoup de littérature française contemporaine, il y a donc des mots qui sont nouveaux pour moi. Merci de vos traductions: à part « thune », je ne reconnais aucun de ces mots! (et je connais « thune » comme une unité, non comme un mot générique).
Oui, Rabin, une idée pour ce qui est du fanor : Asclepias fruticosa (« aussi connu sous le nom de » Gomphocarpus fruticosus), le nom vernaculaire venant du malgache fanory. Votre mère a donc parfaitement raison. Mais vous et moi, qui devons tous deux être plus jeunes qu’elle — ce ne peut qu’être le cas en ce qui vous concerne 🙂 —, nous ne semblons connaître que le fanor vantard, le faiseur. La plante produit un fruit gonflé d’air et est toxique pour le bétail.
Quant à « li déclare ténor » je ne l’ai pour ma part jamais entendu. Sans doute ma culture de l’opéra est-elle insuffisante.
L’expression que j’entends le plus souvent est « mo lapo fess pas pou moi » = je suis fauché/sans le sou…
Oui, ou « so lapo fes pa pou li », ce qui se traduit parfois par « son fond de culotte n’est pas à lui ». C’est peut-être là l’origine de l’expression (raccourcie) « peau de fesse » utilisée par certains pour parler de ceux qui n’ont guère de moyens.
Vous aussi, Siganus, vous êtes beaucoup plus jeune que moi.
C’est possible, Marie-Lucie, mais ces mots ne me sont pas venus tous seuls : j’ai eu à les apprendre lorsque je suis arrivé en France, là où les gens parlaient une langue passablement étrangère. Quand quelqu’un disait par exemple que « X était maqué avec Y », je n’avais aucune idée de ce que cela pouvait signifier.
En Belgique l’expression peau de fesse n’est pas rare et signifie trouduc’, couillon ou personne bête. C’est selon.
En Belgique l’expression peau de fesse n’est pas rare et signifie trouduc’, couillon ou personne bête.
Intéressant. Ça c’est ce qu’à Maurice on appellera simplement “une fesse”, qualificatif pouvant être utilisé pour parler d’un idiot, d’un couillon, de quelqu’un jugé incompétent. De la même façon, dans un registre plus sexuel, on décrira la même personne comme “une gogote”, “un ploc”…